Jeudi, Madrid : les larmes de Morante.
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Las Ventas (Madrid). Jeudi 21 Mai. 15ème de Feria. Lleno de ’No hay Billetes’.
Toros de Juan Pedro Domecq, 1er, faible, 2eme bis de José Vázquez, manso, 3ème bis de José Vázquez, décasté, 4ème potable, 5ème sans race, 6ème, noble et avec de la classe.
Morante de la Puebla, silence après avis et oreille après avis.
José Mª Manzanares, silence et ovation et salut.
Rubén Pinar, qui confirmait l’ alternative, silence et silence.
Ne faisant pas partie de la secte des adorateurs d’ El de La Puebla on est d’autant plus à l’aise pour le dire : quand Morante est bien, c’est bien et c’est même très bien ; ce fut le cas jeudi à Madrid... Au fond on lui reproche de ne pas être tous les jours sur cette longueur d’onde et surtout, d’avoir à ses basques une cohorte d’idolâtres inconditionnels.
Hier oui, et pour l’essentiel à la cape à son second passage, Morante tutoya les sommets. Le Juanpedro (comme toute la corrida excepté le sixième, boyante) était pourtant médiocre. Avec ce mince matériau, le torero offrit un récital de capote qui sonna comme du Mozart, épatant le public.
Il y avait de quoi, car ses véroniques, le corps parfaitement redressé, les mains basses, données toutes dans le rythme du toro, l’accompagnant aimablement jusqu’à la fin de la charge resteront comme un des grands moments de cette féria. On a rarement vu toréer aussi bien à la cape, Paula dont il s’inspire beaucoup, Ordoñez peut-etre...
Trois chicuelinas, basses, terminées par une demie de rêve, conclurent ce moment de génie, ce charme ténu qui saisit une arène trop souvent maussade et pour le coup littéralement subjuguée, comme nous l’étions nous même. Tant de beauté cela paraît irréel...
La faena débuta par deux très belles séries de derchazos bien cadencés puis le toro se dégonflant, elle tourna court. Mais, rendons lui ce mérite : le torero se croisant réussit à arracher quelques naturelles à la plastique supérieure. Il tua en deux temps et coupa une oreille unanimement demandée. L’artiste pleura d’émotion dans le callejon...
Et Manzanares ? Lui aussi fut sensationnel, avec sa muleta puissante et profonde, conduisant un toro incertain (le cinquième) jusqu’aux limites de ses charges et concluant par un estoconazo fulminant.
Il n’eut pas un mouchoir...
Pierre
PS. Ce soir deuxième comparution de Juan Bautista ; avec une surprise à la bodega.